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"Nos musées seront-ils maintenant vides?"

23 novembre 2018

La question de la restitution à l'Afrique d'une partie de son patrimoine culturel arraché au continent et conservé dans les musées français ou européens suscite des commentaires des journaux.

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Museum für außereuropäische Kunst Quai Branly
Image : picture-alliance/dpa/G. Julien

Selon la Neue Zuricher Zeitung, en France, on s'interroge déjà si " les mussés seront maintenant vidés ?". Le journal rappelle que le président Emmanuel Macron ne voyait pas les choses autrement lorsqu'il a déclaré, il y a un an, dans un amphithéâtre de l'université de Ouagadougou, qu'il souhaitait "vivre la restitution temporaire ou définitive du patrimoine culturel africain à l'Afrique" dans les cinq prochaines années. 

Burkina Faso Besuch Emmauel Macron Universität in Ouagadougou
Image : Reuters/P. Wojazer

A l'époque, le président Macron avait brisé un tabou. Pour la première fois dans l'histoire de la France, un président a pris position clairement sur la question de comment traiter les œuvres et objets d'Afrique qui ont été dérobés durant la période coloniale, commente la Neue Zuricher Zeitung. 

"Le patrimoine culturel africain ne peut plus être prisonnier des musées européens", écrit la Suddeutsche Zeitung qui reprend la phrase de l'Elysée qui accompagna l'annonce sur Twitter du président Macron. Celui-ci avait qualifié quelques mois auparavant la colonisation de "crime contre l'humanité". 

Le journal Berliner Zeitung estime pour sa part qu'Emmanuel Macron se considère comme un homme de paroles qui aime aussi poser des actes. C'est pourquoi, il n'a pas hésité de demander à deux experts de produire un rapport sur la forme que pourrait prendre la restitution des œuvres d'arts africaines. 

L'historienne Bénédicte Savoy, professeur au Collège de France à Paris et à la TU Berlin, ainsi que l'économiste et écrivain Felwine Sarr, qui enseigne à l'Université de Saint-Louis au Sénégal, ont accepté l'offre de Macron parce qu'ils y voyaient "la possibilité d'un tournant historique", commente de son côté le journal die Welt.  

Les deux experts se sont entretenus avec 150 autres experts au Sénégal, au Mali, au Cameroun et au Bénin autour 46.000 des 70.000 objets d'Afrique subsaharienne actuellement stockés au musée du quai Branly à Paris qui pourraient être rendus à l’Afrique. 

Une annonce qui suscite déjà des inquiétudes en France. Les Français se demandent si leurs musées seront maintenant vides, écrit le journal Berliner Zeitung.  

Selon la Süddeutsche Zeintung, les experts estiment que plus de 90 % du patrimoine culturel de l'Afrique se trouve en dehors du continent. Le but du rapport est ainsi de créer un peu de justice compensatoire et "donner à la jeunesse africaine la possibilité de renouer le contact avec son patrimoine culturel ".

Et puis le journal Taz, pour sa part, revient sur l'histoire des femmes abusées sexuellement par des casques bleus de l'ONU en Sierra Leone pendant la guerre civile de 1991 à 2002. "Personne ne se souciait des communautés où les femmes ont subi des violences sexuelles commises par la mission de l'ONU", raconte au journal Taz Saramba Kandeh. 

Cette experte des droits de l'homme décrit ses expériences en Sierra Leone où elle travaille comme consultante pour l'organisation internationale Aids Free World.

Elle enquête depuis plusieurs années sur les agressions sexuelles commises par des soldats de la paix des Nations unies dans le pays. 

De 1999 à 2006, des casques bleus de l'ONU ont été déployés pour protéger la population. Save the Children a mentionné les abus sexuels commis par des soldats de la paix dans un rapport publié en 2001 et Human Rights Watch a fait un suivi en 2003. Mais aucune enquête n'a été ouverte, souligne la Taz.

Un rapport public des Nations unies a même fait l'éloge de l'opération menée en Sierra Leone sans dire un mot sur les infractions sexuelles.

 Aujourd’hui, comme il y a plusieurs années, c'est toujours le même sentiment d'impuissance qui anime les femmes victimes d'abus sexuels, du fait que "rien n'est fait  contre les crimes commis par les soldats de l'ONU, parce que c'est l'ONU", écrit la Taz.  

La question est certes abordée au sein des Nations unies, mais l'ONU ne peut pas être à la fois l'auteur, l'enquêteur et le juge, s'indigne Saramba Kandeh.