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Nouvelle loi interdisant les signes religieux ostensibles en France

Sandrine Blanchard11 février 2004
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Les députés français viennent d'adopter à une large majorité une loi interdisant le port de signes religieux « ostensibles » à l'école. Une loi qui concerne notamment le port du foulard islamique par des jeunes filles musulmanes. Un dossier qui intéresse l'Allemagne au plus haut point, puisqu'ici aussi le débat fait rage depuis plusieurs mois.

Die Welt consacre une demie page à la nouvelle législation française. Le journal rappelle que cette réglementation, limitée dans un premier temps à un an, n'entrera en vigueur qu'à la prochaine rentrée scolaire, en septembre. La bataille sémantique a été rude. Les législateurs se sont en effet demandé s'ils devaient parler de signes « ostentatoires », « ostensibles » ou seulement « visibles » ? Quoiqu'il en soit, la proposition initiale du ministre de l'Éducation Nationale, Jules Ferry, d'élargir l'interdiction à certaines formes de barbes considérées elles aussi comme des signes religieux, ou au port du bandana, ce petit foulard très en vogue il y a quinze-vingt ans dans les cours d'école, cette proposition a échoué. La loi actuelle interdit donc la kippa juive, le foulard islamique et les croix « surdimensionnées », dans les écoles publiques, au nom de la laïcité française, c'est-à-dire, la stricte séparation de l'Église et de l'État.

Le sujet intéresse également la Frankfurter Rundschau. Le journal publie la photo d'une jeune musulmane qui porte, sur le foulard qui cache ses cheveux, deux drapeaux français et l'inscription « Fraternité », l'une des trois valeurs fondamentales de la république française. Le quotidien rappelle que la nouvelle loi française a récolté la réprobation du monde arabe, à l'exception du Cheikh de l'université du Caire. En Europe, les avis sont partagés. En Grande-Bretagne, explique le journal, les insignes religieux n'intéressent pas grand monde. Les insulaires « grands-bretons » laissent le choix aux femmes de décider toutes seules ce qu'elles veulent porter. Trois femmes tartares ont réussi à faire jurisprudence en Russie, en faisant accepter des photos d'identité, avec foulard. Quant à la Suède, elle pense plutôt que l'important, c'est davantage ce qu'on a dans la tête que le couvre-chef. Le journal cite une députée socialiste suédoise, qui est elle aussi d'avis qu'il faut laisser le choix aux femmes. Elle note que « Certains voient peut-être aussi les seins en silicone, comme une marque d'assujettissement de la femme. »

La tageszeitung de Berlin quant à elle consacre trois colonnes à l'avis d'une écrivain allemande, Viola Reggenkamp, qui revendique la liberté plutôt que le foulard. Elle raconte qu'elle a participé à une discussion à Berlin, avec des femmes du monde entier. Elle cite l'exemple d'une musulmane qui y participait également, tête découverte, jusqu'à ce que les photographes commencent à prendre des photos. Elle s'est alors empressée de recouvrir sa chevelure, pour échapper aux persécutions dans son pays, si elle était vue tête nue. Viola Reggenkamp rappelle que certaines jeunes musulmanes qui vivent en Allemagne, mais sont issues de familles extrémistes, n'ont pas le droit d'aller en cours de sport, de participer aux cours d'éducation sexuelle ou aux sorties organisées par l'école. Elle déplore les dissensions parmi les féministes, les altermondialistes, et surtout les Verts, qui ferment les yeux sur l'oppression que symbolise l'obligation du port du foulard pour les femmes. Et elle estime qu'une démocratie doit être en mesure de formuler des interdits, là où des fanatiques menacent les droits fondamentaux de certains citoyens, comme la liberté ou l'égalité.