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Russie : Navalny en grève de la faim, ses proches inquiets

1 avril 2021

En prison, le principal opposant de Vladimir Poutine s'est mis en grève de la faim. Une action qui inquiète ses proches, car Navalny est faible physiquement.

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Alexeï Navalny
Une photo d'Alexeï Navalny publiée sur InstagramImage : @NAVALNY/Social Media/REUTERS

Principal détracteur du Kremlin, le militant anticorruption Alexeï Navalny a annoncé ce mercredi 31 mars avoir décidé d'arrêter de s'alimenter pour protester contre ses conditions de détention, accusant l'administration pénitentiaire de lui refuser l'accès à un médecin et à des médicaments et de le "torturer" par privation de sommeil.

Pour justifier sa grève de la faim, l'opposant russe, actuellement détenu dans une colonie pénitenciaire, a présenté une lettre, sur laquelle était notamment inscrite : "J'ai vraiment besoin d'un médecin. Tout prisonnier devrait avoir le droit à un médecin qui l'examine. Même moi, alors que je suis innocent. C'est pourquoi je demande à être autorisé à voir un médecin; et tant que cela ne sera pas le cas, je serai en grève de la faim."

Alexeï Navalny lors de son procès en février dernier
Alexeï Navalny lors de son procès en février dernierImage : Press Office of Moscow's Babushkinsky District Court/ITAR-TASS/imago images

Un état de santé fragile

Une nouvelle qui inquiète particulièrement les proches de Navalny, qui se trouve déjà dans un état de santé très précaire. En effet, l'opposant souffre déjà de fortes douleurs au dos et a perdu de la sensibilité dans ses deux jambes, et n'a pas reçu, selon ses propres dires, de soins adéquats.

Par ailleurs, Navalny avait survécu il y a moins d'un an à un empoisonnement dont il accuse le Kremlin. Après trois semaines de coma, il avait passé cinq mois en convalescence en Allemagne. C'est à son retour en janvier qu'il a été interpellé puis condamné à deux ans et demi de prison dans une vieille affaire de fraude qu'il juge politique. "Après un empoisonnement, personne ne sait comment l'organisme peut réagir" à un refus de s'alimenter, a déclaré à l'AFP Rouslan Chaveddinov, qui estime que "c'est très inquiétant".

La colonie de Pokrov, où est détenu Alexeï Navalny
La colonie de Pokrov, où est détenu Alexeï NavalnyImage : Kirill Zarubin/AP/dpa/picture alliance

Une colonie pénitenciaire très dure

De son côté, l'administration pénitentiaire a balayé les inquiétudes concernant la santé de l'opposant, assurant mercredi qu'il recevait "toute l'assistance médicale nécessaire" et que personne ne troublait son sommeil, comme Navalny l'affirme.

Alexeï Navalny est actuellement emprisonné à Pokrov, à 100 kilomètres de Moscou, dans ce qui est considéré comme l'une des plus dures colonies pénitenciaires de Russie. L'opposant, qui a qualifié cette colonie de "camp de concentration", affirme en outre être menacé d'envoi en cellule disciplinaire à cause d'infractions au règlement, comme par exemple se "lever de son lit dix minutes" trop tôt ou encore pour un "refus de participer" à des exercices physiques obligatoires.

Quant au Kremlin, il a dit n'avoir "aucun commentaire" à faire.

Une méthode souvent utilisée par les détracteurs du pouvoir

Ce n'est pas la première fois qu'un détracteur du pouvoir russe a recours à une grève de la faim pour faire valoir ses droits. À l'été 2019, Lioubov Sobol (une alliée de Navalny) avait passé 32 jours en grève de la faim, n'ingérant que des liquides, après que sa candidature a été refusée à des élections locales. En 2015, Léonid Volkov, le bras droit d'Alexeï Navalny avait fait de même pendant 12 jours.

Le plus célèbre gréviste de la faim récent en Russie reste néanmoins Oleg Sentsov. Ce réalisateur et militant ukrainien, qui a passé près de cinq ans dans un camp russe, avait observé une grève de la faim de 145 jours pour exiger la libération des "prisonniers politiques" ukrainiens en Russie. Durant cette période, Oleg Sentsov ne s'était nourri que de suppléments nutritionnels et d'injections de glucose, avant de la cesser après avoir été menacé d'être nourri de force, mesure drastique qui selon la loi peut se faire oralement, par voie rectale ou par intubation.

Un tel traitement, dénoncé par les militants des droits humains comme une forme de torture, est ce qui pourrait attendre Alexeï Navalny s'il décidait d'aller jusqu'au bout. L'opposant "sait que la grève de la fin est une mesure extrême", commente sur Twitter un de ses alliés, l'économiste Sergueï Gouriev, mais s'il le fait, "c'est qu'il pense n'avoir rien à perdre".