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Scandale d'Abou Ghraib : 10 ans de prison pour Charles Graner

Aude Gensbittel17 janvier 2005

La presse allemande revient largement aujourd’hui sur l’affaire Abou Ghraib, avec la condamnation du soldat américain Charles Graner à 10 ans de prison pour mauvais traitements sur des prisonniers irakiens. Cet homme de 36 ans est considéré comme le meneur d’un groupe de soldats qui avaient infligé des sévices aux détenus de la prison d’Abou Ghraib. Le scandale avait éclaté l’année dernière avec la publication des photos de ces humiliations . Pour bon nombre de quotidiens allemands, l’argument principal de Charles Graner – il n’aurait fait que suivre des ordres de ses supérieurs – n’enlève rien à sa culpabilité.

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Le soldat américain Charles Graner
Le soldat américain Charles GranerImage : AP

Pour la Süddeutsche Zeitung, la condamnation de Charles Graner à dix ans de prison est juste et méritée. Car le soldat n’était pas une simple victime, qui s’est retrouvé contraint d’exécuter les ordres de ses supérieurs malgré les scrupules qui le dévorait. Les photos montrent qu’il prenait un plaisir évident à humilier et à faire souffrir des personnes sans défense. Et si l’on en croit le témoignage de ses camarades, c’était lui le meneur du groupe, qui savait faire preuve d’imagination pour inventer toujours plus de nouveaux jeux de torture. Le verdict du tribunal envers Charles Graner est donc justifié. Mais cela suffit-il pour dire que justice a été faite, se demande le quotidien. La réponse est non. Car personne ne peut croire que les abus d’Abou Ghraib ont été commis à la seule initiative d’un surveillant de nuit désœuvré.

La Frankfurter Rundschau estime quant à elle que malgré cette condamnation, beaucoup de questions restent sans réponse. Par exemple, pourquoi Charles Graner n’a-t-il pas reçu la peine maximale de 15 ans de prison. Quelles circonstances atténuantes le jury a-t-il pu trouver, s’interroge le journal, alors que l’accusé n’a témoigné aucun regrets. Charles Graner s’est contenté de répéter qu’il n’avait fait que suivre des ordres. Des ordres qui selon George W. Bush n’ont jamais existé, poursuit le journal. Bien sûr, pas un mot du tribunal à ce sujet. Le président américain savait avant même le procès que seuls des soldats non gradés étaient responsables du scandale d’Abou Ghraib. Charles Graner se considère comme un bouc émissaire. Contrairement à ce qu’il croit, cela ne le rend pas moins coupable pour autant. Mais il pourrait tout de même bien avoir raison, conclut le quotidien.

Enfin, pour la Tageszeitung, depuis la publication des photos de tortures d’Abou Ghraib, l’administration Bush n’a cessé de qualifié l’affaire de regrettable et choquante, et d’évoquer un cas isolé. Pourtant la seule particularité de ce cas isolé, estime le quotidien, c’est que des photos en ont été divulguées auprès du grand public. D’où la pression sur le gouvernement américain, qui a mené à la condamnation de Charles Graner et qui enverra sans doute également sa complice, Lynndie England, derrière les barreaux. Pourtant, poursuit la taz, on a l’impression qu’avec ces procès les autorités américaines ne délivrent qu’un seul message : l’important, c’est de ne pas se faire prendre.