1. Aller au contenu
  2. Aller au menu principal
  3. Voir les autres sites DW

Un Oscar pour "La vie des autres"

Sandrine Blanchard27 février 2007

C’est le sourire rayonnant de Florian Henckel von Donnersmarck qui fait la Une de nombreux quotidiens ce matin, en Allemagne. Le jeune réalisateur de « La vie des autres » a reçu le week-end dernier l’Oscar du meilleur film étranger, à Hollywood. Une distinction rare pour le cinéma germanophone, d’autant que son film traite d’un sujet délicat.

https://p.dw.com/p/C2hS
Florian Henckel von Donnersmarck
Florian Henckel von DonnersmarckImage : AP

Le film raconte l'histoire d'un officier de la Stasi, la police politique de l’ex-Allemagne de l’est, qui met sur écoute un couple d’artistes et, découvrant leur vie privée plus enviable que la sienne, remet en question son travail de dénonciateur à la solde du régime communiste.

La Süddeutsche Zeitung, éditée à Munich, en Bavière, salue le succès de l’enfant du pays et du Bayrischer Rundfunk, la radio-télévision publique bavaroise, sans qui le film, bien qu’à budget restreint, n’aurait pas pu voir le jour. Le quotidien publie notamment une interview avec un ancien professeur de cinéma de l’ambitieux Florian Henckel von Donnersmarck. Un entretien dont il ressort que dès ses premiers pas dans le cinéma, le réalisateur voulait crever les écrans. Mission accomplie, donc, avec sa consécration hollywoodienne.

En première page de la tageszeitung de Berlin, on peut voir un Oscar orné d’un chapeau à plume bavarois. En sous-tire, cette question : la récompense accordée à « La vie des autres » est-elle méritée ? En guise de réponse, la taz publie deux tribunes, l’une partisane du « oui » et l’autre qui défend le « non ».

Le commentaire favorable au film explique que le succès de « La vie des autres », qui a fait 1,7 millions d’entrées en Allemagne, était aussi inattendu que l’Oscar qu’il a reçu. Un succès qui a mis en évidence le manque de travail de mémoire effectué sur le passé récent de la Stasi et de la RDA en général. Jusqu’à présent, le débat était manichéen et l’image de l’ex-Allemagne de l’est véhiculée sur les écrans était celle d’un monde un peu bizarre, voire loufoque. Quant à la perception de la Stasi, elle se limitait au cliché en vogue dans les années 1990, celui qui la présente comme l’incarnation du Mal. Le commentateur de la taz salue donc le film primé à Hollywood, qui montre que les dossiers de la Stasi ont pu dans certains cas être faussés, et qui évite de tomber dans le piège de la « diabolisation » à outrance.

Dans l’autre tribune, celle défavorable au film, la journaliste estime qu’il est louable de s’attaquer à des thèmes politiques délicats, surtout lorsqu’on parvient à trouver une large audience au sein du public. Mais cela ne suffit pas à faire un bon film. L’auteur de la taz regrette que le réalisateur de « La vie des autres » ait réduit les faits historiques et politiques à une anecdote, un cheminement personnels. Sans aborder les questions cruciales des rapports qu’entretenaient le régime et les artistes dissidents, ni même le pourquoi véritable des écoutes de la Stasi.

La Frankfurter Allgemeine Zeitung analyse plus globalement le renouveau du cinéma allemand sur la scène internationale. Apparemment, écrit la FAZ, personne n’attend des Allemands ni des images foisonnantes qui submergent le spectateur ni une narration complexe, deux éléments qui font pourtant le succès de films étrangers. On attend du cinéma allemand qu’il parle de sujets allemands, historiques si possible, mais dont le traitement ne serait ni spectaculaire, ni controverse, ni humoristique. Pourtant, relève le quotidien, nous avons à Berlin un courant cinématographique intellectuel que de nombreux pays voisins nous envient. L’actualité du cinéma allemand est glorieuse, mais peut-être que son avenir existe au-delà de notre passé historique.