Le pacte mondial sur les migrations, qu'est-ce que c'est ? | PROGRAMME | DW | 05.12.2018
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PROGRAMME

Le pacte mondial sur les migrations, qu'est-ce que c'est ?

Alors que le nombre de personnes avec des origines migratoire ne cesse d'augmenter en Allemagne et à la veille d'une grande conférence internationale sur les migrations à Marrakech, Vu d'Allemagne passe en édition spéciale cette semaine. Votre magazine revient sur le pacte mondiale sur les migrations de l'ONU, qui fait débat, et tente de décrypter le texte.

L'Allemagne compte aujourd'hui, selon les derniers chiffres disponibles, 19 millions 300 000 habitants avec des origines migratoires. Ça veut dire qu'ils sont nés à l'étranger ou qu'au moins un des parents est né sans nationalité allemande. Un chiffre qui représente près d'un quart de la population, 23,6%. Alors cette semaine Vu d'Allemagne profite de l'actualité pour se pencher sur ces migrations aujourd'hui, et notamment le pacte mondiale sur les migrations de l'ONU.

L'Allemagne participera la semaine prochaine, le 10 et 11 décembre, à une grande conférence à Marrakech. Une conférence où doit normalement être adopté un pacte mondial sur les migrations. Un texte de 41 pagespour son édition en français, de l'Assemblée générale des Nations Unies. Il doit fixer un cap, des objectifs mondiaux en termes de migration. Mais ce "pacte mondial pour des migrations, sûres, ordonnées et régulières" ne fait pas consensus. Les débats se sont même multipliés ces derniers jours en Europe. 

"Des millions d'Africains prêts à migrer sont déjà assis sur leurs valises. Le pacte leur promet un hamac social et nous sommes censés l'ouvrir", disait par exemple Gottfried Curio, député du parti d'extrême-droite AFD en Allemagne, tout récemment lors des débats sur ce texte au Bundestag. Depuis l'extrême-droite bataille pour que Berlin ne signe pas ce texte. Des manifestations, aux relents racistes, ont eu lieu à Berlin devant la symbolique porte de Brandebourg ou encore à Bonn, dans l'Ouest, devant le siège allemand des Nations-Unies (Le tweet ci-dessous émane d'une orgnanisation d'extrême-droite)

En Belgique les débats sont aussi très vifs aussi. La Hongrie a annoncé tôt qu'elle ne signerait pas le texte. Position suivie par Israël, l'Autriche ou encore la Slovaquie. Même la première puissance mondiale, les Etats-Unis, ne signera pas ce texte. C'était d'ailleurs le seul des 193 pays des Nations Unies à l'avoir refusé dès son premier paraphage, une première signature en juillet dernier à New-York. 

Que reprochent les opposants ? 

→ Les opposants au texte parlent de perte de souveraineté des Etats. Mais Nicolas Van Nuffel, directeur de plaidoyer au centre de coopération et de développement en Belgique, qui a participé aux négociations sur le sujet, explique que ce texte n'est pas juridique, il n'est pas une loi, et donc n'impose rien aux pays signataires. "C'est une déclaration politique, cela n'a rien de contraignant. Le texte ne fait que réaffirmer des grands principes pour que les migrations se passent dans de bonnes conditions, en partant de l'idée que les migrations peuvent jouer un rôle essentiel, à la fois pour les pays d'origine, les pays d'arrivée et les personnes qui migrent", explique-t-il.

Spanien Migration l Malta nimmt elf Flüchtlinge nach Irrfahrt im Mittelmeer auf

Le nombre de migrants dans le monde est aujourd'hui estimé à 258 millions.

→ Le texte aurait une vision trop unilatérale : la migration est bien décrite comme positive, c'est écrit ainsi. Les opposants parlent ainsi de censure pour qui penserait le contraire. D'atteinte à la liberté de la presse.  "Il faut cesser d'allouer des aides aux médias qui propagent systématiquement l'intolérance, la xénophobie, le racisme et les autres formes de discrimination envers les migrants", peut-on lire. Mais là encore, Nivolas Van Nuffel tente de rassurer. "On pourrait faire la comparaison avec le tabac : l'Etat fait passer le message que ce n'est pas bon, mais un journal peut écrire le contraire. Il n'y a pas de contrainte dans le pacte".

→ Le texte va inciter à plus de personnes à se lancer sur le chemin de la migration, comme le dit l'AFD allemande par exemple. Là-encore, rien de nouveau n'est créé, aucune loi, aucun texte. Et il faut noter encore que ce pacte évoque bien le sort des migrants et non des réfugiés. Ceux qui fuient la guerre ou des persécutions ne sont pas directement concernés par ce texte. Un pacte mondial sur les réfugiés doit être adopté l'an prochain par l'ONU. 

Engagements politiques et moraux

Les 23 objectifs listés par ce texte reprennent finalement les idées des grands textes juridiques ou politiques adoptés par la communauté internationale dans le passé : déclaration universelle des droits de l'homme, pacte international relatifs aux droits économiques, sociaux et culturels ou encore le protocole contre le trafic illicite de migrants. 

Au final cela donne une liste d'engagements moraux, de souhaits, pour rendre les parcours migratoires plus humains. On parle de "mieux informer" pour lutter contre les migrations irrégulières et "sauver des vies", de s'attaquer aux causes de ces migrations ou encore d'éviter les détentions. 

"Populisme"

Ungarn Verhofstadt Billboard

En Hongrie, une affiche contre l'immigration, montrée contre responsable du terrorisme.

Les critiques actuelles ne sont donc que populisme pour Arnaud Zacharie, collègue de Nicolas Van Nuffel et secrétaire général du centre de coopération et de développement en Belgique. "On voit bien que des forces politiques basent tout leur succès sur le rejet des migrations et c'est pourquoi ce pacte mondial rappelle que les migrations ont des effets positifs", explique-t-il. "Cela dérange donc les forces nationales populistes parce qu'on rappelle des évidences, pour ceux qui travaillent sur le sujet et parlent de manière objective. Ca ne veut pas dire qu'il n'y a pas de défis, notamment sur l'intégration, mais abordons ces questions au lieu d'agiter des chiffons dans un but électoraliste", plaide-t-il. 

Un texte pour rien ?

Si ce texte est critiqué tout à droite de l'échiquier politique, il est aussi parfois critiqué de l'autre côté. Cette semaine, par exemple, dans la presse belge, des responsables associatifs s'inquiétaient d'un texte qu’ils considèrent comme "pas la hauteur". "Sur certains points, on pense que ce texte peut être une reculade pour les droits des migrants", estime Driss el Korchi de la Plateforme Euro-Marocaine Migrations et développement. 

Ce Marocain parle de la non condamnation des criminalisations des migrations. "C'est un point essentiel tout comme l'est la question des centres de rétention, qui sont légitimés dans ce pacte", dit-il. Le texte dit en effet encourager à "ne recourir au placement en rétention administrative des migrants qu’en dernier ressort", ce qui légitime selon-lui que cette solution soit parfois utilisée. Il évoque également la convention internationale sur les travailleurs migrants. "Elle est marginalisée dans le pacte", explique-t-il. 

Le nombre de migrants dans le monde est aujourd'hui estimé à 258 millions, soit 3,4% de la population mondiale. Après le sommet de Marrakech, un réseau de coordination sur les migrations pourrait être établi au sein de l'ONU.